57e anniversaire des essais nucléaires de Reggane

07/05/2017 19:36

La Ligue algérienne pour la défense des droits de l'Homme (Laddh) compte saisir la cour pénale internationale de La Haye pour crimes contre l'humanité commis par l'état français à Reggane, au sud de l'Algérie.

A la veille du 57e anniversaire de la commémoration des essais nucléaires commis par la France le 13 février 1960, le secrétaire national de la Laddh (Ligue Algérienne pour la Défense des Droits de l'Homme), Houari Kaddour, a annoncé dans un communiqué rendu public, hier, que son organisation «déposera plainte contre la France pour crimes commis contre l'humanité», pour toutes les conséquences des essais nucléaires et pour son mépris face à toutes les maladies endurées par les Algériens. L'explosion de Reggane, jugée comme la plus grande et la plus dangereuse des essais nucléaires, est l'équivalent de trois bombes d'Hiroshima. La Laddh tente d'alerter l'opinion publique nationale et internationale sur les conséquences néfastes de ces essais et sur l'ampleur de ces expériences nucléaires qui ont duré six années dans le sud du pays. La ligue des droits de l'homme algérienne dénonce l'insouciance dont jouit la France 57 ans après ces essais, et la non-reconnaissance de ces crimes envers des milliers d'algériens. «Plus de 42 000 victimes sont recensées sur place : des nomades, prisonniers et même quelques recrues de l'armée française, et ce, afin de mesurer la puissance de ces essais ‘’expériences’’ et en étudier les effets destructeurs». Plus de 150 000 personnes touchées dans ces zones sont nées avec des malformations congénitales. Malgré ses tentatives d'imposer le black-out sur le dossier, prétextant l'incompétence de la communauté internationale à traiter cette question, en entourant le sujet de confidentialité et en dressant des obstacles à l'accès des chercheurs aux documents et archives français. M. Kaddour constate amèrement une fois de plus «le désintérêt total de la communauté internationale pour les conséquences des essais nucléaires, notamment le plutonium répandu dans l'atmosphère avec tous ses effets dangereux pour les milliers d'années à venir». Pour cela, il dénote qu'il est du devoir des algériens d'exiger que toute la lumière soit faite sur ce dossier noir et de connaître la vérité. La question, aujourd'hui, n'est pas une affaire d'indemnisation des victimes irradiées par les essais nucléaires français de Reggane, mais plutôt celle de la reconnaissance des crimes commis contre des populations innocentes et leur pays. Il s'agit de crime constituant une violation des droits de l'homme. La Laddh dénonce également l'arrêté du 22 septembre 2014 de la loi Morin du 5 janvier 2010, relative à la reconnaissance et à l'indemnisation des victimes des essais nucléaires français, qui constitue, selon la même instance, «une gifle à l'Etat algérien et aux associations des victimes qui se battent depuis 11 ans pour faire valoir leurs droits et faire reconnaître par la France ces crimes». Plus de «730 dossiers algériens de reconnaissance et d'indemnisation des victimes ont été rejetés par la commission ad hoc», au motif que les pathologies déclarées ne rentrent pas dans le cadre de la loi. Les associations des victimes de ces épouvantables bombes ne comptent pas baisser les bras. La carte de l'armée française décrivant les retombées radioactives de l'essai nucléaire français en Algérie devrait servir comme preuve. La carte qui était classée secret défense par la France montre l'impact de ces essais qui va jusqu'en Centrafrique au sud et à la rive nord de la méditerranée.

Essais nucléaires en série...

La France, qui ambitionne d'avoir cette arme dévastatrice qui est la bombe atomique, a choisi le sahara algérien pour faire ses premières expériences et essais nucléaires.
Le site de Reggane est arrêté le 23 juillet 1957 et les travaux y débutent le 1er octobre 1957. Le premier essai nucléaire français, Gerboise bleue, est effectué le 13 février 1960, sous la présidence de Charles de Gaulle. Il s'agit du plus puissant essai nucléaire jamais réalisé, avec 70 Kt. Un champ de tir est créé à Reggane. Les tirs sont effectués à partir d'une tour située plus précisément à Hamoudia, à une cinquantaine de kilomètres au sud-ouest de Reggane. Le rapport annuel du CEA de 1960 montre l'existence d'une zone contaminée de 150 km de long environ. Mais en 2013, la carte classée secret défense des retombées réelles est divulguée, montrant l'immensité des zones touchées, et ce, jusqu'en zone subsaharienne. Des taux de radioactivité différents suivant le déplacement des particules de poussière contenant de l'iode 131, du césium 137. La France doit abandonner les essais aériens au profit d'essais souterrains, moins polluants, anticipant la signature du Traité d'interdiction partielle des essais nucléaires. Les tirs sont réalisés en galeries, chacune étant creusée horizontalement dans un massif granitique du Hoggar, le Tan Afella.
Le 7 novembre 1961, la France réalise son premier essai nucléaire souterrain. Mais le 1er mai 1962, lors du deuxième essai, un nuage radioactif s'échappe de la galerie de tir, la roche ayant été fragilisée lors du premier essai. C'est l'accident de Béryl (du nom de code de l'essai). De novembre 1961 à février 1966, treize tirs en galerie sont effectués, dont quatre n'ont pas été totalement contenus ou confinés (Béryl, Améthyste, Rubis, Jade). Les accords d'Évian avaient prévu que la France devait abandonner ses expériences au Sahara.

Fella Hamici - Le temps - 30 novembre 2017 (?)

 

 

https://www.globalresearch.ca/wp-content/uploads/2014/02/Zones-contamination-Sahara1.jpg

Résultats de recherche d'images pour « La carte de l'armée française décrivant les retombées radioactives de l'essai nucléaire frança »

https://www.dissident-media.org/infonucleaire/news_veterans.html

 

 

Essais nucléaires : des témoignages émouvants : Ciné-débat

 

À la demande de l'Aven46 (Association des vétérans des essais nucléaires), le cinéma l'Atelier à Gramat a proposé, jeudi 20 avril, un ciné débat sur les essais nucléaires français et leurs conséquences, autour du film «Bons baisers de Moruroa» de Larbi Benchiha. En introduction, Arlette Dellac, vice-présidente de l'Aven, a expliqué que son association, ni pro, ni anti-nucléaire, avait uniquement pour objectif de soutenir la cause de tous les vétérans, et particulièrement de ceux porteurs de maladies radio-induites, en intervenant auprès des autorités administratives et judiciaires pour obtenir la reconnaissance de la nation. Elle précise que 40 membres de l'association décèdent chaque année.

La cinquantaine de personnes a pu ensuite voir ou revoir sur grand écran, dans quelles conditions s'étaient déroulés les essais nucléaires en Polynésie. Les témoignages évoqués dans le film, comme ceux des vétérans présents dans la salle, ont confirmé que peu d'entre eux avaient été informés des risques induits par les essais nucléaires. Certains, jeunes appelés du contingent ou techniciens, se souvenaient surtout de la beauté des paysages et d'une vie agréable en Polynésie. Les problèmes sont apparus ensuite.

Dans le débat qui a suivi, Paul Roualdes (Aven 46) et René Rey (Aven 82) ont parlé de leur vécu sur site et apporté des précisions concernant les études en cours sur les conséquences des essais nucléaires sur les vétérans, mais aussi sur leurs descendants (handicap, stérilité…).

La Dépêche du Midi - Publié le 28/04/2017

 

 

on avait hiroshima en tête

"... secret défense

 « Bien sûr, on était en plein dans la guerre d’Algérie, mais je ne savais pas ce que j’allais y faire. » D’abord, on demande à sa compagnie, la 22e du 11e Génie saharien, de construire des bâtiments. Leurs futures chambres. « On a passé les six premiers mois à dormir dans des tentes. » Une fois installés, c’est des cailloux que les militaires doivent ramasser sur le plateau de Reggane. Beaucoup. « Il fallait avoir rempli dix camions avant qu’il ne fasse trop chaud. Les gens du désert venaient nous aider. » Pour construire des blockhaus qui protégeront les scientifiques qui vont mener les essais, mais ça, Daniel Bourdon et ses compagnons ne le comprendront qu’après. Après le 13 février 1960.

Ce matin-là, on leur intime de se rendre sur une dune, à 47 kilomètres de la base militaire. « C’était une erreur : on aurait dû se cacher derrière. » On leur demande de tourner le dos à l’essai, de fermer les yeux, de ne les rouvrir qu’une fois qu’ils auront vu passer, à travers leurs paupières closes, une lueur rouge. « On était, comme d’habitude, en chemise, en short, un dosimètre autour du cou pour mesurer la radioactivité (ndlr : les dosimètres n’étaient pas nominatifs et devaient être rendus en rentrant à la base). » C’est le silence. « On avait Hiroshima en tête. » Et puis, la bombe A explose, « du haut d’une tour de 100 mètres », trois fois plus puissante que les bombes qui ont plu sur le Japon en 1945. Daniel Bourdon voit cette lumière rouge « alors même que j’avais mon bras devant mes yeux ». Les gars se relèvent. « On a regardé le champignon nucléaire qui s’était formé. » Seulement, ils n’avaient pas prévu qu’avec la distance, la déflagration n’arriverait qu’après la lueur. « On a été surpris. Certains hommes se sont trouvés sur le derrière. » L’opération Gerboise bleue venait de s’achever. Sans heurts. Daniel Bourdon avait 22 ans et deux mois. Il allait assister, en avril de cette même année, au deuxième essai français. « Là, la bombe était d’une puissance beaucoup plus faible. L’explosion a, à nouveau, été réalisée à l’extérieur. Ensuite, elles ont eu lieu dans des souterrains. »...."

Par CARINE Di Matteo - |